Couchés en étoile dans la combustion lente des jours

« Couchés en étoile dans la combustion lente des jours » de Sophie Jeukens

L’amour au temps des moteurs à réactionAprès son recueil Kérosène : carnet d’incendies publié aux Éditions Fond’tonne en 2015, Sophie Jeukens nous revient avec d’autres sulfureux poèmes aux odeurs de gaz dans Couchés en étoile dans la combustion lente des jours aux Éditions de Ta Mère. De Marseille à Chicago, pour revenir souvent sous les couvertures, la poétesse nous entraîne sur les pistes brûlantes de liaisons passagères et d’adieux fracassants qui ont marqué son parcours de jeune adulte. La plupart du temps, ces espaces du souvenir volent en éclat au moment …

D'autres font du vitrail

« D’autres font du vitrail » d’Isabelle Dionne

Restaurer la lumièreDans son premier livre, D’autres font du vitrail, Isabelle Dionne nous présente une quarantaine de textes qui deviennent, chacun à leur façon, une fenêtre par laquelle elle observe le monde. Qu’il s’agisse de raconter un souvenir de voyage, une anecdote de famille ou d’enseignement, la narratrice découpe ses sujets comme des morceaux de verre colorés par ses émotions. Le gris d’un matin froid, le vert des jardins, le rouge des ratures sur les copies d’étudiants, la peau blanche de l’enfant à soigner ; on y passe par toutes …

Morceaux de mémoire de Mathieu Dubé

Morceaux de mémoire de Mathieu Dubé

De l’art de recycler les petits caractèresL’« éleveur de vers libres » Mathieu Dubé réalise un assemblage fort captivant avec ses Morceaux de mémoire. Visuellement magnifique, son ouvrage de collages poétiques réunit des mots et des expressions découpés dans le quotidien afin de récupérer les fragments de poésie « qui dorment ensevelis sous les décombres » et oubliés dans nos piles infinies d’imprimés prêt-à-jeter. Dépassant le simple exercice ludique, voulant que l’on réarrange les mots au hasard comme des puzzles surréalistes, l’artiste crée de toutes pièces d’émouvants récits grâce à son exacto. Comme s’il …

Autopsie de Charles Amand de Claude La Charité

Autopsie de Charles Amand de Claude La Charité

Tous les livres sauf unDans son Autopsie de Charles Amand, Claude La Charité nous entraîne avec un plaisir contagieux sur les lieux mêmes du premier « sortilège » qui scella les débuts de notre littérature. C’est-à-dire que son Autopsie se veut la suite du premier roman québécois, L’influence d’un livre, que nous a donné Philippe Aubert de Gaspé fils en 1837: une histoire de chercheur d’or qui « vivait dans ses livres », de ses lectures pas trop catholiques et de pacte avec le diable. Ce faisant, l’auteur contemporain réinvente les traces de l’écrivain …

Après Céleste et Dis Merci

Après Céleste de Maude Nepveu-Villeneuve et Dis merci de Camille Paré-Poirier

Récits de survivantes et d’endeuilléesLa vie n’est pas tendre pour les personnages de Camille dans le récit poétique Dis Merci et de Dolores dans le roman Après Céleste, qui doivent traverser des épreuves bouleversantes : le cancer pour la première, la perte d’un enfant pour la seconde. Mais elles renoueront avec l’espoir, avec le beau, avec la vie, si fragile soit-elle. Deux livres qui se tiennent d’abord au bord du gouffre qui menace d’avaler les héroïnes, pour ensuite les entraîner sur le chemin de la rémission.Après Céleste, avant la forêtL’histoire du …

Radiale de Valérie Forgues

Radiale de Valérie Forgues

Voie de collisionJ’ai découvert la poésie de Valérie Forgues avec Une robe pour la chasse, sans conteste un de mes recueils préférés. Avec Radiale, on accède à un nouvel univers. Un territoire de langage « en tête-à-queue », de corps et de matière accidentés, disloqués, que la poétesse file sur leurs lignes brisées.« Fixée au cou j’égratigne la zone le poignet embrasse tes grands axes en retrait pour me défenestrer sans abîmer le décor »Valérie ForguesDans la « succession des terres incendiées » et des « espaces éventrés », Radiale vibre au son d’un moteur, d’un …

Trou l'immortelle de Camille Thibodeau

Découvertes aux éditions La Mèche

Trou l’immortelle de Camille Thibodeau« [M]ais quel est ce langage qui n’a aucun sens en-dehors de sa violence? » Dans le premier roman de Camille Thibodeau, Trou l’immortelle, on tombe sur une foule de personnages qui nagent à contre-courant des protagonistes réalistes traditionnels. Au village Candeur, le bogue de l’an 2000 et l’exode rural frappent la populace tandis que Nancy Narcisse donne naissance à un bébé à face de poisson qu’elle appellera Trinité Horth, en l’honneur du « père [que sa fille] aura jamais, du fils [qu’elle aura] jamais et …

Mauve est un verbe pour ma gorge de Nana Quinn

Mauve est un verbe pour ma gorge de Nana Quinn

D’amour et d’ecchymoses Mauve est un verbe pour ma gorge : ce titre m’avait énormément marquée lorsque je l’avais lu l’année dernière sur la liste des poèmes finalistes pour le Prix de poésie Radio-Canada 2020 (prix que son autrice a d’ailleurs remporté). Depuis ce moment, je crois que j’attendais ce recueil. C’est donc avec une grande impatience que je me suis lancée dans le recueil de Nana Quinn, paru aux éditions Poètes de brousse. Et j’ai eu un gros coup de cœur! Inspirés par la violence conjugale qu’elle a subie, les …

Ma vie en lo-fi de Simon Labelle

Ma vie en lo-fi de Simon Labelle

Monter le sonUne BD qui illustre le sens de l’ouïe et la « myopie des oreilles », géniale comme idée, non? Ça ressemble à quoi des bruits blancs, des acouphènes? Un party de Noël en son « hautement indéfini »? Une journée au bureau sur mute? Dans Ma vie en lo-fi de Simon Labelle, on apprivoise les défis reliés aux différents problèmes de surdité : l’adaptation aux appareils auditifs, les visites chez l’audiologiste, les nombreuses fois où l’on doit demander « pourriez-vous répéter s’il vous plait ? » et beaucoup de bruits à identifier, à décoder. Constituée d’une …

Disparaître de Denise Desautels

Disparaître de Denise Desautels, avec les œuvres de Sylvie Cotton

Fouiller la cendre, parler du cœurComme j’aime aussi être accompagnée d’œuvres diverses lorsque j’écris, le recueil Disparaître de Denise Desautels m’a tout de suite interpellée. Chaque suite de la poétesse est escortée par une œuvre de Sylvie Cotton, une artiste autodidacte et interdisciplinaire ayant à son actif plusieurs expositions et livres d’artiste. Dans ce « face à face » d’images et de voix qui s’élèvent, les mots traversent les cadres pour plonger dans ce qu’ils protègent du silence, de l’oubli.« Tu dis Parfois j’ai peur tu insistes Contempler la mort. La cendre …