L’amour au temps des moteurs à réaction
Après son recueil Kérosène : carnet d’incendies publié aux Éditions Fond’tonne en 2015, Sophie Jeukens nous revient avec d’autres sulfureux poèmes aux odeurs de gaz dans Couchés en étoile dans la combustion lente des jours aux Éditions de Ta Mère.
De Marseille à Chicago, pour revenir souvent sous les couvertures, la poétesse nous entraîne sur les pistes brûlantes de liaisons passagères et d’adieux fracassants qui ont marqué son parcours de jeune adulte. La plupart du temps, ces espaces du souvenir volent en éclat au moment de plier bagage.
mon départ a arraché tes dents
désincarcéré les oiseaux rouges
de ta gorgeau décollage
la porcelaine de ton rire
s’est fracassée contre la tôle
le poids contre la portance
de mes doutesc’était peut-être la plus belle des erreurs
peut-être la plus heureuse
des trahisons
nos rendez-vous manqués
ont fait la peau au voyagej’avais les bras trop courts pour te prendre
la tête encombrée de débris d’accidentl’hiver était en état d’ébriété
la neige se noyait à mesure
dans le lac Michigan
Propulsée par une soif d’espace et d’amour, « le cœur encore trempé de kérosène », la narratrice finira toutefois par entrevoir une vie au-delà du manque et des perpétuels voyages, un enracinement possible avec un enfant à venir. Elle pourra alors s’imaginer une maison pour éteindre ses feux, ou du moins, en profiter pour faire « flamber des guimauves sur les braises ».
Un recueil qui nous laisse entrer peu à peu dans la douceur après les écorchures et les batailles du quotidien!
Sophie Jeukens, Couchés en étoile dans la combustion lente des jour, Ta Mère, 2022.
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